EXHORTATION APOSTOLIQUE C’EST LA CONFIANCE DU SAINT-PÈRE FRANÇOIS SUR LA CONFIANCE EN L’AMOUR MISÉRICORDIEUX DE DIEU À L’OCCASION DU 150e ANNIVERSAIRE DE LA NAISSANCE DE
SAINTE THÉRÈSE DE L’ENFANT JÉSUS ET DE LA SAINTE FACE
1 « C’est la confiance et rien que la confiance qui doit nous conduire à l’Amour ». [1]
2. Ces paroles très fortes de Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus et de
la Sainte Face disent tout. Elles résument le génie de sa spiritualité
et suffiraient à justifier qu’on l’ait déclarée Docteur de l’Église.
Seule la confiance, et “rien d’autre”, il n’y a pas d’autre chemin pour
nous conduire à l’Amour qui donne tout. Par la confiance, la source de
la grâce déborde dans nos vies, l’Évangile se fait chair en nous et nous
transforme en canaux de miséricorde pour nos frères.
3. C’est la confiance qui nous soutient chaque jour et qui nous fera
tenir debout sous le regard du Seigneur lorsqu’il nous appellera à Lui :
« Au soir de cette vie, je paraîtrai devant vous les mains vides, car
je ne vous demande pas, Seigneur, de compter mes œuvres. Toutes nos
justices ont des taches à vos yeux. Je veux donc me revêtir de votre
propre Justice et recevoir de votre Amour la possession éternelle de
Vous-même ». [2]
4. Thérèse est l’une des saintes les plus connues et les plus aimées
dans le monde entier. Comme saint François d’Assise, elle est aimée même
par les non-chrétiens et les non-croyants. Elle a également été
reconnue par l’UNESCO comme l’une des figures les plus significatives de
l’humanité contemporaine. [3] Il nous sera bon d’approfondir son message à l’occasion du 150 anniversaire de sa naissance, à Alençon le 2 janvier 1873, et du centenaire de sa béatification. [4]
Mais je n’ai pas voulu rendre publique cette exhortation à l’une de ces
dates, ni le jour de sa mémoire, pour que ce message aille au-delà de
cette célébration et soit compris comme faisant partie du trésor
spirituel de l’Église. La date de cette publication, mémoire de sainte
Thérèse d’Avila, a pour but de présenter sainte Thérèse de l’Enfant
Jésus et de la Sainte Face comme un fruit mûr de la réforme du Carmel et
de la spiritualité de la grande Sainte espagnole.
5. Sa vie terrestre fut brève, vingt-quatre ans, simple comme
n’importe quelle autre, d’abord dans sa famille, puis au Carmel de
Lisieux. La lumière et l’amour extraordinaires qui rayonnaient de sa
personne se sont manifestés immédiatement après sa mort par la
publication de ses écrits et par les innombrables grâces obtenues par
les fidèles qui l’ont invoquée.
6. L’Église a vite reconnu la valeur extraordinaire de son témoignage
et l’originalité de sa spiritualité évangélique. Thérèse rencontra Léon
XIII lors d’un pèlerinage à Rome en 1887 et lui demanda la permission
d’entrer au Carmel à l’âge de quinze ans. Peu après sa mort, saint Pie X
se rendit compte de son immense stature spirituelle, au point
d’affirmer qu’elle deviendrait la plus grande sainte des temps modernes.
Déclarée vénérable en 1921 par Benoît XV, qui fit l’éloge de ses vertus
en les centrant sur la “petite voie” de l’enfance spirituelle, [5]
elle fut béatifiée il y a cent ans, puis canonisée le 17 mai 1925 par
Pie XI qui remercia le Seigneur d’avoir permis que Thérèse de l’Enfant
Jésus et de la Sainte Face soit la première bienheureuse qu’il ait
élevée aux honneurs des autels, et la première sainte qu’il ait
canonisée. [6] Le même Pape la déclara Patronne des Missions en 1927. [7] Elle fut proclamée l’une des saintes Patronnes de la France en 1944 par le vénérable Pie XII [8] qui approfondit à plusieurs reprises le thème de l’enfance spirituelle. [9]
Saint Paul VI aimait rappeler son baptême reçu le 30 septembre 1897,
jour de la mort de sainte Thérèse, et, à l’occasion du centenaire de sa
naissance, il écrivit à l’évêque de Bayeux et Lisieux sur sa doctrine. [10] Lors de son premier voyage apostolique en France, saint Jean-Paul II se rendit à la basilique qui lui est dédiée, le 2 juin 1980 et, en 1997, il la déclara Docteur de l’Église [11] en tant qu’ « experte en scientia amoris ». [12]
Benoît XVI reprit le thème de sa “science de l’amour” en la proposant
comme « un guide pour tous, en particulier pour ceux qui, au sein du
peuple de Dieu, exercent le ministère de théologiens ». [13]
Enfin, j’ai eu la joie de canoniser ses parents, Louis et Zélie, en
2015 lors du Synode sur la famille et je lui ai récemment consacré une
catéchèse du cycle sur le thème du zèle apostolique. [14]
1. Jésus pour les autres
7. Dans le nom qu’elle choisit comme religieuse, apparaît Jésus :
l’“Enfant” qui manifeste le mystère de l’Incarnation, et la “Sainte
Face”, c’est-à-dire le visage du Christ qui se donne jusqu’au bout sur
la Croix. Elle est “Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus et de la Sainte
Face”.
8. Le Nom de Jésus est continuellement “respiré” par Thérèse comme un
acte d’amour, jusqu’à son dernier souffle. Elle avait également aussi
gravé ces mots dans sa cellule : “Jésus est mon seul amour”. C’était son
interprétation de l’affirmation centrale du Nouveau Testament : « Dieu
est amour » (1 Jn 4, 8.16).
Une âme missionnaire
9. Comme il arrive dans toute rencontre authentique avec le Christ,
son expérience de foi l’appelait à la mission. Thérèse a pu définir sa
mission en ces termes : « Je désirerai au Ciel la même chose que sur la
terre : Aimer Jésus et le faire aimer ». [15] Elle a écrit qu’elle était entrée au Carmel « pour sauver les âmes ». [16]
En d’autres termes, elle ne concevait pas sa consécration à Dieu en
dehors de la recherche du bien de ses frères. Elle partageait l’amour
miséricordieux du Père pour l’enfant pécheur, et celui du Bon Pasteur
pour les brebis perdues, éloignées, blessées. C’est pourquoi elle est la
Patronne des missions, maîtresse en évangélisation.
10. Les dernières pages de l’ Histoire d’une âme [17] sont un testament missionnaire. Elles expriment sa manière de concevoir l’évangélisation par attraction, [18] et non par pression ou prosélytisme. Il est intéressant de lire comment elle le résume : « “ Attirez- moi,
nous courrons à l’odeur de vos parfums”. O Jésus, il n’est donc même
pas nécessaire de dire : En m’attirant, attirez les âmes que j’aime.
Cette simple parole : “Attirez-moi” suffit. Seigneur, je le comprends,
lorsqu’une âme s’est laissée captiver par l’odeur enivrante de vos
parfums, elle ne saurait courir seule, toutes les âmes qu’elle aime sont
entraînées à sa suite ; cela se fait sans contrainte, sans effort,
c’est une conséquence naturelle de son attraction vers vous. De même
qu’un torrent, se jetant avec impétuosité dans l’océan, entraîne après
lui tout ce qu’il a rencontré sur son passage, de même, ô mon Jésus,
l’âme qui se plonge dans l’océan sans rivages de votre amour, attire
avec elle tous les trésors qu’elle possède... Seigneur, vous le savez,
je n’ai point d’autres trésors que les âmes qu’il vous a plu d’unir à la
mienne ». [19]
11. Elle cite ici les paroles que l’épouse adresse à l’époux dans le Cantique des Cantiques
(1, 3-4), selon l’interprétation approfondie par les deux docteurs du
Carmel, sainte Thérèse de Jésus et saint Jean de la Croix. L’Époux est
Jésus, le Fils de Dieu qui s’est uni à notre humanité dans l’incarnation
et l’a rachetée sur la Croix. De son côté ouvert, il a donné naissance à
l’Église, son Épouse bien-aimée pour laquelle il a donné sa vie (cf. Ep
5, 25). Ce qui est frappant, c’est que Thérèse, consciente d’être
proche de la mort, ne vit pas ce mystère refermée sur elle-même, dans un
sentiment de seule consolation, mais avec un esprit apostolique
fervent.
La grâce qui nous libère de l’autoréférentialité
12. Il en va de même lorsqu’elle parle de l’action de l’Esprit Saint,
qui acquiert immédiatement un sens missionnaire : « Voici ma prière, je
demande à Jésus de m’attirer dans les flammes de son amour, de m’unir
si étroitement Lui, qu’Il vive et agisse en moi. Je sens que plus le feu
de l’amour embrasera mon cœur, plus je dirai : Attirez-moi, plus aussi
les âmes qui s’approcheront de moi (pauvre petit débris de fer inutile,
si je m’éloignais du brasier divin), plus ces âmes courront avec vitesse
à l’odeur des parfums de leur Bien-Aimé, car une âme embrasée d’amour
ne peut rester inactive ». [20]
13. Dans le cœur de Thérèse, la grâce du baptême devient ce torrent
impétueux qui se jette dans l’océan de l’amour du Christ, emportant avec
lui une multitude de sœurs et de frères. C’est ce qui arriva en
particulier après sa mort : sa promesse d’une « pluie de roses ». [21]
2. La petite voie de la confiance et de l’amour
14. L’une des découvertes les plus importantes de Thérèse, pour le
bien de tout le peuple de Dieu, est sa “petite voie”, la voie de la
confiance et de l’amour, connue aussi sous le nom de Voie de l’enfance spirituelle.
Tous peuvent la suivre, dans tout état de vie, à chaque moment de
l’existence. C’est la voie que le Père céleste révèle aux petits (cf. Mt 11, 25).
15. Thérèse raconta sa découverte de la petite voie dans l’ Histoire d’une âme : [22]
« Je puis donc, malgré ma petitesse, aspirer à la sainteté ; me
grandir, c’est impossible, je dois me supporter telle que je suis avec
toutes mes imperfections; mais je veux chercher le moyen d’aller au Ciel
par une petite voie bien droite, bien courte, une petite voie toute
nouvelle ». [23]
16. Pour la décrire, elle utilise l’image de l’ascenseur : «
L’ascenseur qui doit m’élever jusqu’au Ciel, ce sont vos bras, ô Jésus !
Pour cela je n’ai pas besoin de grandir, au contraire il faut que je
reste petite, que je le devienne de plus en plus ». [24] Petite, incapable d’avoir confiance en elle-même, mais confiante en la puissance aimante des bras du Seigneur.
17. C’est “la douce voie de l’amour”, [25]
ouverte par Jésus aux petits et aux pauvres, à tous. C’est le chemin de
la vraie joie. Face à une conception pélagienne de la sainteté, [26]
individualiste et élitiste, plus ascétique que mystique, qui met
surtout l’accent sur l’effort humain, Thérèse souligne toujours la
primauté de l’action de Dieu, de sa grâce. Elle va ainsi jusqu’à dire : «
Je sens toujours la même confiance audacieuse de devenir une grande
Sainte, car je ne compte pas sur mes mérites n’en ayant aucun,
mais j’espère en Celui qui est la Vertu, la Sainteté Même, c’est Lui
seul qui se contentant de mes faibles efforts m’élèvera jusqu’à Lui et,
me couvrant de ses mérites infinis, me fera Sainte ». [27]
Au-delà de tout mérite
18. Cette façon de penser ne contredit pas l’enseignement catholique
traditionnel sur la croissance de la grâce. Justifiés gratuitement par
la grâce sanctifiante, nous sommes transformés et capables de coopérer
par nos bonnes actions à un chemin de croissance en sainteté. De cette
façon, nous sommes élevés de telle sorte que nous pouvons avoir de
véritables mérites pour le développement de la grâce reçue.
19. Mais Thérèse préfère souligner la primauté de l’action divine et
inviter à la pleine confiance en regardant l’amour du Christ qui nous
est donné jusqu’au bout. Elle enseigne au fond que, puisque nous ne
pouvons avoir aucune certitude en nous regardant nous-mêmes, [28]
nous ne pouvons pas non plus être certains de posséder des mérites. Il
n’est donc pas possible de nous appuyer sur nos efforts ou sur ce que
nous faisons. Le Catéchisme a voulu citer les paroles de sainte Thérèse
lorsqu’elle dit au Seigneur « Je paraîtrai devant vous les mains vides
», [29] pour exprimer que « les saints ont toujours eu une conscience vive que leurs mérites étaient pure grâce ». [30] Cette conviction suscite une joyeuse et tendre gratitude.
20. L’attitude la plus appropriée est donc de mettre la confiance du
cœur hors de soi-même, en la miséricorde infinie d’un Dieu qui aime sans
limites et qui a tout donné sur la Croix de Jésus-Christ. [31] C’est pourquoi elle n’utilise jamais l’expression, fréquente à son époque, “je me ferai sainte”.
21. En revanche, sa confiance illimitée encourage ceux qui se sentent
fragiles, limités, pécheurs à se laisser conduire et transformer pour
atteindre le sommet : « Ah ! Si toutes les âmes faibles et imparfaites
sentaient ce que sent la plus petite de toutes les âmes, l’âme de votre
petite Thérèse, pas une seule ne désespérerait d’arriver au sommet de la
montagne de l’amour, puisque Jésus ne demande pas de grandes actions,
mais seulement l’abandon et la reconnaissance ». [32]
22. Cette même insistance de Thérèse sur l’initiative divine fait
que, lorsqu’elle parle de l’Eucharistie, elle ne met pas en premier son
désir de recevoir Jésus dans la sainte communion, mais le désir de Jésus
de s’unir à nous et demeurer dans nos cœurs. [33] Dans l’Acte d’offrande à l’Amour Miséricordieux, souffrant de ne pouvoir recevoir la communion tous les jours, elle dit à Jésus : « Restez-en moi, comme au tabernacle ». [34]
Le centre et l’objet de son regard ne sont pas elle-même avec ses
besoins, mais le Christ qui aime, qui cherche, qui désire, qui demeure
dans l’âme.
L’abandon quotidien
23. La confiance que Thérèse promeut ne doit pas être comprise
seulement par rapport à la sanctification et au salut personnels. Elle a
un sens intégral qui embrasse la totalité de l’existence concrète et
s’applique à toute notre vie où nous sommes souvent envahis par les
peurs, par le désir de sécurité humaine, par le besoin de tout
contrôler. C’est là qu’apparaît l’invitation à un saint “abandon”.
24. La pleine confiance, qui devient abandon dans l’Amour, nous
libère des calculs obsessionnels, de l’inquiétude constante pour
l’avenir, des peurs qui enlèvent la paix. Dans ses derniers jours,
Thérèse insistait sur ce point : « Nous qui courrons dans la voie de
l’Amour, je trouve que nous ne devons pas penser à ce qui peut nous
arriver de douloureux dans l’avenir, car alors c’est manquer de
confiance ». [35]
Si nous sommes entre les mains d’un Père qui nous aime sans limites,
cela sera vrai en toutes circonstances, nous nous en sortirons quoi
qu’il arrive et, d’une manière ou d’une autre, son plan d’amour et de
plénitude se réalisera dans notre vie.
Un feu au milieu de la nuit
25. Thérèse a vécu la foi la plus forte et la plus certaine dans
l’obscurité de la nuit et même dans l’obscurité du Calvaire. Son
témoignage a atteint son apogée dans la dernière période de sa vie, dans
sa grande « épreuve contre la foi », [36] qui commença à Pâques 1896. Dans son récit, [37]
elle met cette épreuve en relation directe avec la douloureuse réalité
de l’athéisme de son temps. Elle a vécu en effet à la fin du XIX
siècle, “âge d’or” de l’athéisme moderne en tant que système
philosophique et idéologique. Lorsqu’elle écrit que Jésus avait permis
que mon âme « fût envahie des plus épaisses ténèbres », [38]
elle désigne les ténèbres de l’athéisme et le rejet de la foi
chrétienne. En union avec Jésus, qui a pris sur lui toutes les ténèbres
du péché du monde en acceptant de boire la coupe de la Passion, Thérèse
perçoit, dans ces ténèbres, le désespoir, le vide du néant. [39]
26. Mais les ténèbres ne peuvent pas éteindre la Lumière : elles ont
été vaincues par Celui qui, comme Lumière, est venu dans le monde (cf. Jn 12, 46). [40]
Le récit de Thérèse montre le caractère héroïque de sa foi, sa victoire
dans le combat spirituel face aux tentations les plus fortes. Elle se
sent la sœur des athées et se met à table, comme Jésus, avec les
pécheurs (cf. Mt 9, 10-13). Elle intercède pour eux, tout en
renouvelant continuellement son acte de foi, toujours en communion
amoureuse avec le Seigneur : « Je cours vers mon Jésus, je lui dis être
prête à verser jusqu’à la dernière goutte de mon sang pour confesser
qu’il y a un Ciel. Je Lui dis que je suis heureuse de ne pas jouir de ce
beau Ciel sur la terre afin qu’Il l’ouvre pour l’éternité aux pauvres
incrédules ». [41]
27. Dans la foi, elle vit intensément une confiance illimitée en la
miséricorde infinie de Dieu : « Une confiance qui doit nous conduire à
l’amour ». [42]
Elle vit, même dans l’obscurité, la confiance totale de l’enfant qui
s’abandonne sans crainte dans les bras de son père et de sa mère. Pour
Thérèse, en effet, Dieu brille avant tout par sa miséricorde, clé pour
comprendre tout ce qui est dit de Lui : « À moi Il a donné sa Miséricorde infinie, et c’est à travers elle que je contemple et adore les autres perfections Divines !... Alors toutes m’apparaissent rayonnantes d’ amour, la Justice même (et peut-être encore plus que toutes les autres) me semble revêtue d’ amour ». [43]
C’est l’une des découvertes les plus importantes de Thérèse, l’une de
ses plus grandes contributions pour l’ensemble du peuple de Dieu. Elle
est entrée de manière extraordinaire dans les profondeurs de la
miséricorde divine et y a puisé la lumière de son espérance sans
limites.
Une très ferme espérance
28. Avant son entrée au Carmel, Thérèse fit l’expérience d’une
singulière proximité spirituelle avec l’un des hommes les plus
malheureux, le criminel Henri Pranzini, condamné à mort pour triple
assassinat, et impénitent. [44]
Offrant la messe pour lui et priant avec une totale confiance pour son
salut, elle est sûre de le mettre en contact avec le Sang de Jésus et
elle dit à Dieu être certaine qu’au dernier moment Il lui pardonnera et
qu’elle y croira « même s’il ne se confessait pas et ne donnait aucune marque de repentir ». Elle donne la raison de cette certitude : « tant j’avais de confiance en la miséricorde infinie de Jésus ». [45]
Quelle émotion ensuite lorsqu’elle découvre que Pranzini, monté sur
l’échafaud, « tout à coup, saisi d’une inspiration subite, se retourne,
saisit un Crucifix que lui présentait le prêtre et baise par trois fois
ses plaies sacrées !...». [46] Cette
expérience intense d’espérer contre toute espérance a été fondamentale
pour elle : « Depuis cette grâce unique, mon désir de sauver les âmes
grandit chaque jour ». [47]
29. Elle est consciente du drame du péché, même si nous la voyons
toujours introduite dans le mystère du Christ, avec la certitude que «
là où le péché a abondé, la grâce a surabondé » ( Rm 5, 20). Le
péché du monde est immense, mais il n’est pas infini. En revanche,
l’amour miséricordieux du Rédempteur est infini. Thérèse est témoin de
la victoire définitive de Jésus sur toutes les forces du mal par sa
passion, sa mort et sa résurrection. Mue par la confiance, elle ose
écrire : « Jésus, fais que je sauve beaucoup d’âmes, qu’aujourd’hui il
n’y en ait pas une seule de damnée [...]. Jésus, pardonne-moi si je dis
des choses qu’il ne faut pas dire, je ne veux que te réjouir et te
consoler ». [48]
Cela nous permet de passer à un autre aspect de l’air frais qu’est le
message de Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus et de la Sainte Face.
3. Je serai l’amour
30. “Plus grande” que la foi et que l’espérance, la charité ne passera jamais (cf. 1 Co 13, 8-13). Elle est le plus grand don de l’Esprit Saint, « la mère et la racine de toutes les vertus ». [49]
La charité comme attitude personnelle d’amour
31. L’ Histoire d’une âme est un témoignage de charité où
Thérèse nous offre un commentaire du commandement nouveau de Jésus : «
Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés » ( Jn 15, 12) [50]. Jésus a soif de cette réponse à son amour. En effet, « il n’a pas craint de mendier un peu d’eau à la Samaritaine. Il avait soif... Mais en disant : “donne-moi à boire”, c’était l’ amour de sa pauvre créature que le Créateur de l’univers réclamait. Il avait soif d’amour… ». [51] Thérèse veut correspondre à l’amour de Jésus, lui rendre amour pour amour. [52]
32. Le symbolisme de l’amour conjugal exprime la réciprocité du don de soi entre l’époux et l’épouse. Ainsi, inspirée par le Cantique des Cantiques
(2, 16), elle écrit : « Je pense que le cœur de mon époux est à moi
seule, comme le mien est à lui seul, et je lui parle alors dans la
solitude de ce délicieux cœur à cœur en attendant de le contempler un
jour face à face !... ». [53]
Même si le Seigneur nous aime tous ensemble en tant que Peuple, la
charité agit en même temps de manière très personnelle, “de cœur à
cœur”.
33. Thérèse a la vive certitude que Jésus l’a aimée et l’a connue
personnellement dans sa Passion : « Il m’a aimé et s’est livré lui-même
pour moi » ( Ga 2, 20). Contemplant Jésus dans son agonie, elle lui dit : « Tu me vis ». [54]
De même, elle dit à l’Enfant Jésus dans les bras de sa Mère : « De ta
petite main qui caressait Marie, Tu soutenais le monde et Tu lui donnais
la vie. Et tu pensais à moi ». [55] Ainsi, toujours au début de l’ Histoire d’une âme, elle contemple l’amour de Jésus pour chacun, comme s’il était unique au monde. [56]
34. L’acte d’amour “Jésus, je t’aime”, continuellement vécu par
Thérèse comme une respiration, est la clé de sa lecture de l’Évangile.
Elle se plonge avec cet amour dans tous les mystères de la vie du
Christ, dont elle devient contemporaine, habitant l’Évangile avec Marie
et Joseph, Marie Madeleine et les Apôtres. Avec eux, elle pénètre dans
les profondeurs de l’amour du Cœur de Jésus. Prenons un exemple : «
Lorsque je vois Madeleine s’avancer devant les nombreux convives,
arroser de ses larmes les pieds de son Maître adoré, qu’elle touche pour
la première fois ; je sens que son cœur a compris les abîmes d’amour et de miséricorde du Cœur de Jésus
et que toute pécheresse qu’elle est ce Cœur d’amour est non seulement
disposé à lui pardonner, mais encore à lui prodiguer les bienfaits de
son intimité divine, à l’élever jusqu’aux plus hauts sommets de la
contemplation ». [57]
Le plus grand amour dans la plus grande simplicité
35. À la fin de l’ Histoire d’une âme, Thérèse nous livre son Offrande comme Victime d’Holocauste à l’Amour Miséricordieux du Bon Dieu. [58]
En se livrant pleinement à l’action de l’Esprit, elle reçoit, sans
bruit ni signes particuliers, la surabondance de l’eau vive : « Les
fleuves, ou plutôt les océans de grâces qui sont venus inonder mon âme…
». [59]
C’est la vie mystique qui, même dépourvue de phénomènes
extraordinaires, est proposée à tous les fidèles comme une expérience
quotidienne d’amour.
36. Thérèse vit la charité dans la petitesse, dans les choses les
plus simples de la vie quotidienne, et elle le fait en compagnie de la
Vierge Marie, en apprenant d’elle qu’« aimer c’est tout donner et se donner soi-même ». [60]
En effet, alors que les prédicateurs de son temps parlaient souvent de
la grandeur de Marie de manière triomphaliste, éloignée de nous, Thérèse
montre, à partir de l’Évangile, que Marie est la plus grande dans le
Royaume des Cieux parce qu’elle est la plus petite (cf. Mt 18,
4), la plus proche de Jésus dans son humiliation. Elle voit que, si les
récits apocryphes sont remplis de passages frappants et merveilleux, les
Évangiles nous montrent une existence humble et pauvre, vécue dans la
simplicité de la foi. Jésus lui-même veut que Marie soit l’exemple de
l’âme qui le cherche avec une foi dépouillée. [61]
Marie a été la première à vivre la “petite voie” dans la foi pure et
l’humilité ; c’est pourquoi Thérèse n’a pas peur d’écrire :
« Je sais qu’à Nazareth, Mère pleine de grâces Tu vis très pauvrement, ne voulant rien de plus Point de ravissements, de miracles, d’extases N’embellissent ta vie, ô Reine des Élus !... Le nombre des petits est bien grand sur la terre Ils peuvent sans trembler vers toi lever les yeux. C’est par la voie commune, incomparable Mère Qu’il te plait de marcher pour les guider aux Cieux. » [62]
37. Thérèse nous a aussi donné des récits de moments de grâce vécus
dans la simplicité quotidienne, par exemple son inspiration soudaine en
accompagnant une sœur malade au caractère difficile. Mais il s’agit
toujours d’expériences d’une charité intense vécue dans l’ordinaire : «
Un soir d’hiver, j’accomplissais comme d’habitude mon petit office, il
faisait froid, il faisait nuit… Tout à coup j’entendis dans le lointain
le son harmonieux d’un instrument de musique, alors je me représentai un
salon bien éclairé, tout brillant de dorures, des jeunes filles
élégamment vêtues se faisant mutuellement des compliments et des
politesses mondaines ; puis mon regard se porta sur la pauvre malade que
je soutenais ; au lieu d’une mélodie j’entendais de temps en temps ses
gémissements plaintifs, au lieu de dorures, je voyais les briques de
notre cloître austère, à peine éclairé par une faible lueur. Je ne puis
exprimer ce qui se passa dans mon âme, ce que je sais c’est que le
Seigneur l’illumina des rayons de la vérité qui surpassèrent tellement
l’éclat ténébreux des fêtes de la terre, que je ne pouvais croire à mon
bonheur… Ah ! pour jouir mille ans des fêtes mondaines, je n’aurais pas
donné les dix minutes employées à remplir mon humble office de charité…
». [63]
Au cœur de l’Église
38. Thérèse a hérité de Sainte Thérèse d’Avila un grand amour pour
l’Église et a pu atteindre les profondeurs de ce mystère. Nous le voyons
dans sa découverte du “cœur de l’Église”. Dans une longue prière à
Jésus, [64]
écrite le 8 septembre 1896, jour du sixième anniversaire de sa
profession religieuse, la Sainte confie au Seigneur qu’elle est animée
d’un immense désir, d’une passion pour l’Évangile qu’aucune vocation ne
peut satisfaire à elle seule. Ainsi, à la recherche de sa “place” dans
l’Église, elle relit les chapitres 12 et 13 de la première Lettre de
saint Paul aux Corinthiens.
39. Au chapitre 12, l’Apôtre utilise la métaphore du corps et de ses
membres pour expliquer que l’Église comprend une grande variété de
charismes ordonnés selon un ordre hiérarchique. Mais cette description
ne suffit pas à Thérèse. Elle poursuit ses recherches, lit l’“hymne à la
charité” du chapitre 13, y trouve la grande réponse et écrit cette page
mémorable : « Considérant le corps mystique de l’Église, je ne m’étais
reconnue dans aucun des membres décrits par saint Paul, ou plutôt je
voulais me reconnaître en tous... La Charité me donna la clef de ma vocation.
Je compris que si l’Église avait un corps, composé de différents
membres, le plus nécessaire, le plus noble de tous ne lui manquait pas,
je compris que l’Église avait un Cœur, et que ce Cœur était brûlant
d’amour. Je compris que l’Amour seul faisait agir les membres de
l’Église, que si l’Amour venait à s’éteindre, les Apôtres
n’annonceraient plus l’Évangile, les Martyrs refuseraient de verser leur
sang… Je compris que l’ Amour renfermait toutes les Vocations,
que l’Amour était tout, qu’il embrassait tous les temps et tous les
lieux... en un mot, qu’il est éternel !... Alors dans l’excès de ma joie
délirante, je me suis écriée : O Jésus, mon Amour... ma vocation, enfin
je l’ai trouvée, ma vocation, c’est l’Amour... Oui j’ai trouvé ma place
dans l’Église et cette place, ô mon Dieu, c’est vous qui me l’avez
donnée... dans le Cœur de l’Église, ma Mère, je serai l’Amour... ainsi
je serai tout... ainsi mon rêve sera réalisé !!!... ». [65]
40. Ce n’est pas le cœur d’une Église triomphaliste, c’est le cœur
d’une Église aimante, humble et miséricordieuse. Thérèse ne se met
jamais au-dessus des autres, mais à la dernière place avec le Fils de
Dieu qui, pour nous, a pris la condition de serviteur et s’est humilié,
devenant obéissant jusqu’à la mort sur une croix (cf. Ph 2, 7-8).
41. Une telle découverte du cœur de l’Église est aussi une grande
lumière pour nous aujourd’hui, afin de ne pas nous scandaliser des
limites et des faiblesses de l’institution ecclésiastique, marquée par
des obscurités ou des péchés, et entrer dans son “cœur brûlant d’amour”
qui s’est embrasé le jour de la Pentecôte par le don de l’Esprit Saint.
C’est le cœur dont le feu se ravive encore par chacun de nos actes de
charité. “Je serai l’amour” : voilà le choix radical de Thérèse, sa
synthèse définitive, son identité spirituelle la plus personnelle.
Pluie de roses
42. Suite à de nombreux siècles au cours desquels nombre de saints
ont exprimé, avec grande ferveur et beauté, leur désir d’“aller au
ciel”, sainte Thérèse reconnait avec grande sincérité : « J’avais alors
de grandes épreuves intérieures de toutes sortes (jusqu’à me demander
parfois s’il y avait un Ciel) ». [66]
À un autre moment, elle dit : « Lorsque je chante le bonheur du Ciel,
l’éternelle possession de Dieu, je n’en ressens aucune joie, car je
chante simplement ce que je veux croire ». [67]
Que se passait-il ? Elle entendait l’appel de Dieu à mettre le feu au
cœur de l’Église plus qu’elle ne rêvait de son propre bonheur.
43. La transformation qui s’est produite en elle lui a permis de
passer d’un fervent désir du Ciel à un désir ardent et continu du bien
de tous, culminant dans le rêve de poursuivre au Ciel sa mission d’aimer
Jésus et de le faire aimer. En ce sens, elle écrit dans une de ses
dernières lettres : « Je compte bien ne pas rester inactive au Ciel, mon
désir est de travailler encore pour l’Église et les âmes ». [68] Et à cette même période, elle dit plus directement : « M on Ciel se passera sur la terre jusqu’à la fin du monde. Oui, je veux passer mon Ciel à faire du bien sur la terre ». [69]
44. Thérèse exprimait ainsi sa réponse la plus convaincue au don
unique que le Seigneur lui faisait, à cette lumière surprenante que Dieu
lui déversait. De cette façon, elle arrivait à sa dernière synthèse
personnelle de l’Évangile, qui partait de la pleine confiance pour
atteindre son point culminant dans le don total aux autres. Elle ne
doutait pas de la fécondité de ce don : « J e pense à tout le bien que je voudrais faire après ma mort ». [70] « Le bon Dieu ne me donnerait pas ce désir de faire du bien sur la terre après ma mort, s’il ne voulait pas le réaliser ». [71] « Ce sera comme une pluie de roses ». [72]
45. Le cercle se ferme. « C’est la confiance ». C’est la
confiance qui nous conduit à l’Amour et nous libère ainsi de la peur,
c’est la confiance qui nous aide à détourner le regard de nous-mêmes,
c’est la confiance qui nous permet de remettre entre les mains de Dieu
ce que lui seul peut faire. Cela nous laisse un immense torrent d’amour
et d’énergies disponibles pour rechercher le bien des frères. Et ainsi,
au milieu de la souffrance de ses derniers jours, elle pouvait dire : « Je ne compte plus que sur l ’amour ». [73]
À la fin, seul compte l’amour. La confiance fait jaillir les roses et
les répand comme un débordement de la surabondance de l’amour divin.
Demandons-la comme un don gratuit, comme un don précieux de la grâce,
pour que les voies de l’Évangile s’ouvrent dans nos vies.
4. Au cœur de l’Évangile
46. Dans Evangelii gaudium,
j’ai insisté sur l’invitation à revenir à la fraîcheur de la source
pour mettre l’accent sur ce qui est essentiel et indispensable. Je crois
qu’il est opportun de reprendre et de proposer à nouveau cette
invitation.
Le Docteur de la synthèse
47. Cette Exhortation sur sainte Thérèse me permet de rappeler que,
dans une Église missionnaire, « l’annonce se concentre sur l’essentiel,
sur ce qui est plus beau, plus grand, plus attirant et en même temps
plus nécessaire. La proposition se simplifie, sans perdre pour cela
profondeur et vérité, et devient ainsi plus convaincante et plus
lumineuse ». [74] Le cœur lumineux c’est « la beauté de l’amour salvifique de Dieu manifesté en Jésus Christ mort et ressuscité ». [75]
48. Tout n’est pas central, car il y a un ordre ou une hiérarchie
entre les vérités de l’Église, et « ceci vaut autant pour les dogmes de
foi que pour l’ensemble des enseignements de l’Église, y compris
l’enseignement moral ». [76]
Le centre de la morale chrétienne c’est la charité qui est la réponse à
l’amour inconditionnel de la Trinité. C’est pourquoi « les œuvres
d’amour envers le prochain sont la manifestation extérieure la plus
parfaite de la grâce intérieure de l’Esprit ». [77] À la fin, seul l’amour compte.
49. Précisément, l’apport spécifique que nous offre Thérèse comme
Sainte et comme Docteur de l’Église n’est pas analytique, comme pourrait
l’être par exemple celui de saint Thomas d’Aquin. Son apport est plutôt
synthétique, car son génie est de nous conduire au centre, à
l’essentiel, au plus indispensable. Elle montre par ses paroles et par
son parcours personnel que, même si tous les enseignements et normes de
l’Église ont leur importance, leur valeur, leur lumière, certains sont
plus urgents et plus structurants dans la vie chrétienne. C’est là que
Thérèse a mis son regard et son cœur.
50. Théologiens, moralistes, penseurs de la spiritualité, ainsi que
les pasteurs et chaque croyant dans son milieu, nous devons encore
recueillir cette intuition géniale de Thérèse et en tirer les
conséquences tant théoriques que pratiques, tant doctrinales que
pastorales, tant personnelles que communautaires. Il faut de l’audace et
de la liberté intérieure pour y parvenir.
51. L’on cite parfois seulement des expressions périphériques de
cette sainte, ou bien l’on mentionne des questions qu’elle peut avoir en
commun avec tous les autres saints : la prière, le sacrifice, la piété
eucharistique, et tant d’autres beaux témoignages. Mais, en faisant
ainsi, nous nous privons de ce qu’elle a de spécifique, de ce qu’elle
donne à l’Église, parce que nous oublions que « chaque saint est une
mission ; il est un projet du Père pour refléter et incarner, à un
moment déterminé de l’histoire, un aspect de l’Évangile ». [78]
C’est pourquoi, « pour reconnaître quelle est cette parole que le
Seigneur veut dire à travers un saint, il ne faut pas s’arrêter aux
détails […]. Ce qu’il faut considérer, c’est l’ensemble de sa vie, tout
son cheminement de sanctification, cette figure qui reflète quelque
chose de Jésus-Christ et qui se révèle quand on parvient à percevoir le
sens de la totalité de sa personne ». [79] Cela vaut plus encore pour sainte Thérèse, qui est “Docteur de la synthèse”.
52. Du ciel à la terre, l’actualité de sainte Thérèse de l’Enfant
Jésus et de la Sainte Face demeure dans toute sa “petite grandeur”.
En un temps qui nous invite à nous enfermer dans nos intérêts
particuliers, Thérèse nous montre qu’il est beau de faire de la vie un
don.
À un moment où les besoins les plus superficiels prévalent, elle est témoin du radicalisme évangélique.
En un temps d’individualisme, elle nous fait découvrir la valeur de l’amour qui devient intercession.
À un moment où l’être humain est obsédé par la grandeur et par de
nouvelles formes de pouvoir, elle montre le chemin de la petitesse.
En un temps où de nombreux êtres humains sont rejetés, elle nous enseigne la beauté d’être attentif, de prendre soin de l’autre.
À un moment de complexité, elle peut nous aider à redécouvrir la
simplicité, la primauté absolue de l’amour, la confiance et l’abandon,
en dépassant une logique légaliste et moralisante qui remplit la vie
chrétienne d’observances et de préceptes et fige la joie de l’Évangile.
En un temps de replis et d’enfermements, Thérèse nous invite à une
sortie missionnaire, conquis par l’attrait de Jésus Christ et de
l’Évangile.
53. Un siècle et demi après sa naissance, Thérèse est plus vivante
que jamais au cœur de l’Église en chemin, au cœur du Peuple de Dieu.
Elle est en pèlerinage avec nous, faisant le bien sur la terre, comme
elle le désira tant. Les innombrables “roses” que Thérèse répand sont le
signe le plus beau de sa vitalité spirituelle, c’est-à-dire les grâces
que Dieu nous donne par son intercession comblée d’amour, pour nous
soutenir sur le chemin de la vie.
Chère sainte Thérèse, l’Église a besoin de faire resplendir la couleur, le parfum, la joie de l’Évangile. Envoie-nous tes roses. Aide-nous à avoir toujours confiance, comme tu l’as fait, dans le grand amour que Dieu a pour nous, afin que nous puissions imiter chaque jour ta petite voie de sainteté. Amen.
Donné à Rome, Saint-Jean-de-Latran, le 15 octobre, mémoire de
sainte Thérèse d’Avila, de l’année 2023, la onzième de mon Pontificat.
FRANÇOIS
[1] Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus et de la Sainte Face, Œuvres complètes, LT 197, à Sœur Marie du Sacré-Cœur (17 septembre 1896), Paris 1996, p. 553.
Il sera toujours fait référence à cette édition qui utilise les
abréviations suivantes : Ms A : Manuscrit autobiographique “A” ; Ms B :
Manuscrit autobiographique “B” ; Ms C : Manuscrit autobiographique “C” ;
LT : Lettres ; PN : Poésies ; Pri : Prières ; CJ : “Carnet jaune” ; DE :
Derniers entretiens.
[2] Pri 6, Offrande de moi-même comme Victime d’Holocauste à l’Amour Miséricordieux du Bon Dieu (9 juin 1895), p. 963.
[3]
Pour la période 2022-2023, l’UNESCO a inscrit Sainte Thérèse de Enfant
Jésus et de la Sainte Face comme personnalité à célébrer à l’occasion du
150 anniversaire de sa naissance.
[4] 29 avril 1923.
[5] Cf. Décret sur les vertus (14 août 1921) : AAS 13 (1921), pp. 449-452.
[6] Homélie pour la canonisation (17 mai 1925) : AAS 17 (1925), p. 211.
[7] Cf. AAS 20 (1928), pp. 147-148.
[8] Cf. AAS 36 (1944), pp. 329-330.
[9] Lettre à Mgr F. Picaud, Évêque de Bayeux et Lisieux (7 août 1947) in Analecta OCD 19 (1947), pp. 168-171 ; Message radiodiffusé pour la consécration de la Basilique de Lisieux (11 juillet 1954) : AAS 46 (1954), pp. 404-407.
[10] Cf. Lettre
à Mgr Jean-Marie-Clément Badré, Évêque de Bayeux et Lisieux, à
l'occasion du centenaire de la naissance de Sainte Thérèse de l’Enfant
Jésus (2 janvier 1973) : AAS 65 (1973), pp. 12-15.
[11] Cf. AAS 90 (1998), 409-413, pp. 930-944.
[12] Lett. ap. Novo Millennio ineunte (6 janvier 2001), n. 42 : AAS 93 (2001), p. 296.
[13] Catéchèse (6 avril 2011) : L’Osservatore Romano, ed. en langue française (7 avril 2011), p. 1.
[14] Cf. Catéchèse (7 juin 2023) : L’Osservatore Romano, ed. en langue française (8 juin 2023).
[15] LT 220, à l’abbé Bellière (24 février 1897), p. 576.
[16] Ms A, 69v°, p. 187.
[17] Cf. Ms C, 33v°-37r°, pp. 280-285.
[18] Cf. Exhort. ap. Evangelii gaudium (24 novembre 2013), n. 14 : AAS 105 (2013), pp. 1025-1026.
[19] Ms C, 34r°, p. 281.
[20] Ibid., 36r°, p. 284.
[21] CJ, 9 juin 1897, 3, p. 1013.
[22] Cf. Ms C, 2v°-3r°, pp. 237-238.
[23] Ibid., 2v°, p. 237.
[24] Ibid., 3r°, p. 238.
[25] Cf. Ms A, 84v°, p. 213.
[26] Cf. Exhort. ap. Gaudete et exsultate (19 mars 2018), nn. 47-62 : AAS 110 (2018), pp. 1124-1129.
[27] Ms A, 32r°, p. 120.
[28]
Le Concile de Trente l’expliquait ainsi : « Quiconque se considère
lui-même, ainsi que sa propre faiblesse et ses mauvaises dispositions,
peut être rempli d’effroi et de crainte au sujet de sa grâce » ( Décret sur la justification,
IX : DS, n. 1534). Le Catéchisme de l’Église Catholique le reprend
lorsqu’il enseigne qu’il est impossible d’avoir une certitude sur nos
propres sentiments ou sur nos œuvres (cf. n. 2005). La certitude de la
confiance ne se trouve pas en nous-mêmes ; le propre moi ne fournit pas
la base de cette certitude, qui ne repose pas sur une introspection.
D’une certaine manière, saint Paul l’exprimait ainsi : « Je ne me juge
même pas moi-même. Ma conscience ne me reproche rien, mais ce n’est pas
pour cela que je suis juste : celui qui me soumet au jugement, c’est le
Seigneur » (1 Co 4, 3-4). Saint Thomas d’Aquin l’expliquait ainsi
: puisque « la grâce est de quelque manière imparfaite en ce sens
qu’elle ne guérit pas totalement l’homme » ( Summa I-II, q. 109, art. 9, ad 1), « il reste aussi une certaine obscurité d’ignorance dans l’intelligence » ( ibid., co).
[29] Pri 6, p. 963.
[30] Catéchisme de l’Église Catholique, n. 2011.
[31] Le Concile de Trente l’affirme clairement aussi: « Aucun homme pieux ne doit mettre en doute la miséricorde de Dieu » ( Décret sur la justification, IX : DS, n. 1534). « Tous doivent placer et faire reposer dans le secours de Dieu la plus ferme espérance » ( Ibid., XIII : DS, n. 1541).
[32] Ms B, 1v°, p. 220.
[33] Cf. Ms A, 48v°, p. 148 ; LT 92, à Marie Guérin (30 mai 1889), p. 393.
[34] Pri 6, p. 963.
[35] CJ, 23 juillet 1897, 3, p. 1054.
[36] Ms C, 31rº, p. 277.
[37] Cf. ibid., 5rº-7vº, pp. 240-244.
[38] Ibid., 5vº, p. 241.
[39] Cf. ibid., 6vº, pp. 242-243.
[40] Cf. Lett. enc. Lumen fidei (29 juin 2013), n. 17 : AAS 105 (2013), p. 564-565.
[41] Ms C, 7rº, p. 243.
[42] LT 197, à sœur Maríe du Sacré Coeur (17 septembre 1896), p. 553.
[43] Ms A, 83vº, p. 211.
[44] Cf. ibid., 45vº-46vº, pp. 143-145.
[45] Ibid., 46rº, p. 144.
[46] Ibid.
[47] Ibid., 46vº, p. 144.
[48] Pri 2, p. 958.
[49] Summa Theologiae, I-II, q. 62, art. 4.
[50] Cf. Ms C, 11v°-31r°, pp. 249-276.
[51] Ms B, 1vº, pp. 220-221.
[52] Cf. ibid., 4rº, pp. 227-228.
[53] LT 122, à Céline (14 octobre 1890), p. 431.
[54] PN 24, 21, p. 697.
[55] Ibid., 6, p. 693.
[56] Cf. Ms A, 3rº, p. 73.
[57] LT 247, à l’abbé Belliére (21 juin 1897), pp. 603-604.
[58] Cf. Pri 6, pp. 962-964.
[59] Ms A, 84rº, p. 212.
[60] PN 54, 22, p. 755.
[61] Cf. ibid., 15, p. 753
[62] Ibid., 17, p. 754.
[63] Ms C, 29vº-30rº, pp. 274-275.
[64] Cf. Ms B, 2r°-5v° : p. 222-232.
[65] Ibid., 3v°, p. 226.
[66]
Ms A, 80v°, p. 205. Ce n’était pas un manque de foi. Saint Thomas
d’Aquin enseigne que dans la foi opèrent la volonté et l’intelligence.
L’adhésion de la volonté peut être très solide et enracinée, tandis que
l’intelligence peut être obscurcie : cf. De Veritate 14, 1.
[67] Ms C, 7v°, p. 244.
[68] LT 254, au P. Roulland (14 juillet 1897), p. 609.
[69] CJ , 17 juillet 1897, p. 1050.
[70] Ibid., 13 juillet 1897, 17, p. 1042.
[71] Ibid., 18 juillet 1897, 1, p. 1051.
[72] CJ, 9 juin 1897, 3, p. 1013.
[73] LT 242, à Sœur Marie de la Trinité (6 juin 1897), p. 599.
[74] Exhort. ap. Evangelii gaudium (24 novembre 2013), n. 35 : AAS 105 (2013), p. 1034.
[75] Ibid., n. 36 : AAS 105 (2013), p. 1035.
[76] Ibid.
[77] Ibid., n. 37 : AAS 105 (2013), p. 1035.
[78] Exhort. ap. Gaudete et exsultate (19 mars 2018), n. 19 : AAS 110 (2018), p. 1117.
[79] Ibid., n. 22 : AAS 110 (2018), p. 1117.
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